Galerie Plein Sud, exposition Oli Sorenson

Jusqu’au 3 juillet 2021, avec l’exposition Panorama de l’Anthropocène, Oli Sorenson présente une panoplie d’œuvres créées dans un style hybride qui évoque autant la mise en page carrée d’Instagram, les paysages pixélisés de Minecraft que les peintures géométriques de Peter Halley.

Par Corinne Bénichou

L‘Anthropocène est une époque de l’histoire de la Terre proposée pour caractériser l’ensemble des événements géologiques qui se sont produits depuis que les activités humaines ont une incidence globale significative sur l’écosystème terrestre.

Tandis que Halley faisait référence dans ses tableaux aux cellules de la prison panoptique du philosophe Michel Foucault, les images de Sorenson rappellent plutôt les infrastructures modulaires des sociétés post-industrielles, des réseaux informatiques aux marchés boursiers, des systèmes de télécommunication aux voies de transport maritime, ainsi que les sites d’extraction minière ou les zones d’agriculture intensive. « C’est comme une course à relais, j’ai pris son iconographie et je l’ai amené ailleurs, j’ai un peu inversé l’architecture panoptique (regard intérieur de surveillance envers les prisonniers, côté assez négatif) avec ce panorama, une vision d’ensemble qui cherche à unir ces activités pour en prendre conscience. Je mets l’accent sur le danger qui nous attend si on ne prend pas un certain tournant. Mon message est vert dans le sens écologique du mot. »

Grandement influencé par la création musicale, le DJing * et ses modes de diffusion, le peintre définit sa pratique comme un art du remix. Sans tomber dans le pastiche ni la répétition, il remet en question les aspects d’originalité et d’authenticité, à l’ère de la surabondance d’information numérique, s’inspire du vocabulaire visuel d’artistes de réputation internationale pour réactualiser leurs formes vers de nouveaux thèmes et matériaux. En privilégiant des actes de citation et de partage, ses œuvres accueillent un éventail plus large de gestes créateurs, plus vaste que celui engendré par un travail solitaire en atelier, afin d’ébranler l’idée selon laquelle la production artistique n’émergerait qu’en vase clos. « En début de carrière, il y a vingt ans déjà, je sentais un décalage entre ma façon et la volonté des professeurs encourageant les artistes à être originaux à tout prix. À l’époque, à chaque fois, la nouvelle génération devait faire table rase du passé. Je posais donc la question : Pourquoi était-ce si important de se démarquer au lieu de former des liens en continuité ? Dans le monde de la musique, c’est encore possible d’exister pas seulement en tant que créateur mais aussi comme interprète. J’ai vraiment été inspiré par ce milieu, en particulier avec la musique émergente des années 2000, j’ai été charmé par cette pratique de combiner ses propres mélodies avec celles des autres. Du coup, je me suis lié d’amitié avec plusieurs de ces musiciens en tant que vidéo-jockey et j’ai participé à leurs performances en mettant des animations synchronisées. »

Composée de peintures, d’impressions numériques et d’écrans vidéos aux couleurs extrêmement vives, la série présentée à Plein sud est conçue pour occuper tout l’espace mural de la galerie. Par cet accrochage immersif, l’artiste souhaite tracer le portrait des sociétés actuelles et de leurs artefacts s’accumulant sur une étendue toujours plus accrue de la Terre, au point d’y causer d’urgentes répercussions écologiques.

Oli Sorenson vit et travaille à Montréal. Sa pratique du remix a été initialement reconnue à Londres où il a participé à plusieurs événements d’art médiatiques présentés, entre autres, à l’Institute of Contemporary Arts (2003-2006), à la Tate Britain (2006) ainsi qu’au British Film Institute (2008-2010). Il s’est également illustré sur la scène internationale au Center for Art and Media (Karlsruhe, 2002), à ISEA (Helsinki, 2004), puis aux festivals Mapping (Genève, 2009) et Sonica (Ljubljana, 2012). Depuis qu’il s’est installé à Montréal, en 2010, il a poursuivi ses recherches et peaufiné sa démarche en orientant son travail pour les espaces en galerie. En 2014, ses œuvres ont été présentées à la Power Plant de Toronto, en 2015, au festival FILE de Sao Paulo, en 2017, à l’exposition Monitoring à Kassel en Allemagne, en 2018 à la galerie Art Mûr de Berlin et en 2020, à l’Agence TOPO à Montréal.

* Terme anglais désignant l’ensemble des techniques utilisées par les disc-jockeys afin de produire des créations originales.

Pendant la pandémie, l’entrée à Plein sud se fait par le 100, De Gentilly Est.

Galerie Plein Sud
Cégep Édouard-Montpetit
150, rue de Gentilly
local E D 0626
Longueuil.
(450) 679-2966
www.plein-sud.org

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